XXII Colloque de spiritualité orthodoxe

Bose, 17 octobre 2013
"Heureux les pacifiques" (Mt 5,9) est le thème choisi pour le XXIIe Colloque œcuménique international de spiritualité orthodoxe

« Heureux les pacifiques » (Mt 5,9)

Bose, 3-6 septembre 2014

« Heureux les artisans de paix » (Mt 5,9) : l’annonce de cette béatitude évangélique, qui est souvent répétée au cours de la Divine Liturgie, ne cesse d’interpeller la con science de chaque homme et la pratique des Églises.

Le XXIIe Colloque œcuménique international de spiritualité orthodoxe entend se mettre à l’écoute de l’évangile de la paix, qui appelle les Églises à être un ferment de réconciliation et de paix parmi les femmes et les hommes contemporains. L’espérance de la paix annoncée en Christ n’est pas une utopie étrangère à un monde dominé par la logique du conflit et du pouvoir, mais c’est un événement dans l’histoire, qui s’incarne en tout temps dans des hommes et des femmes de réconciliation.

En approfondissant la dimension théologique de la paix et de son ancrage dans la révélation, le colloque désire proposer un itinéraire à travers l’écoute et l’étude de l’Écriture et de la liturgie, les paroles sur la paix chez les pères de l’Église, l’enseignement de l’expérience monastique et spirituelle de l’Orient chrétien, pour discerner les racines de la violence et offrir les raisons d’une authentique éducation à la paix : dans l’hospitalité de celui qui est différent, dans la besogne de la réconciliation, dans le labeur du pardon.

Pour le croyant, la paix est un don. Les psaumes chantent le don de la paix de Dieu à son peuple, qui est aussi un appel pressant à la conversion : si les hommes réalisent la justice et font miséricorde, la paix habite la terre ; alors « amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent » (Ps 85/85,11). Dans le Nouveau Testament, la paix est le don du Christ ressuscité à sa communauté (Jn 20,19-21), c’est un fruit de l’Esprit saint (Ga 5,22), c’est le sceau de la nouvelle alliance que Dieu conclut avec toute l’humanité et la création entière, réconciliée dans la vie, la passion, la mort et la résurrection de Jésus (voir Rm 5,1.11).

La réflexion des pères d’Orient et d’Occident établit un lien essentiel entre la paix dans le monde et le Christ, « notre paix » (Ep 2,14). En commentant les paroles de Jésus à ses disciples dans le quatrième Évangile (« Je vous donne ma paix » : Jn 14,27), saint Cyrille d’Alexandrie identifie le don de la paix avec l’envoi de l’Esprit saint : « La paix qui surpasse les principautés, les puissances, les trônes et les dominations et toute intelligence (voir Ph 4,7 ; Ep 1,21), est l’Esprit du Christ. Par lui, le Fils a réconcilié la création tout entière avec Dieu le Père. »

La dimension cosmique de cette réconciliation par le Christ « de toutes les choses qui sont sur la terre et dans les cieux » (Col 1,19-20) est saisie avec force dans les commentaires des pères : « Ils avaient déjà été réconciliés – écrit Jean Chrysostome – mais une réconciliation parfaite était nécessaire, qui ne porte aucune trace d’inimitié. » Ce noyau théologique est le fondement de l’unité de l’Église et de la réconciliation entre les Églises, selon une ligne de pensée qui se développe de manière cohérente de saint Clément de Rome à saint Irénée de Lyon, de saint Basile à saint Grégoire de Nazianze.

Les pères privilégient l’aspect spirituel de la paix par rapport à sa dimension politique et sociale, qui sera la préoccupation de la réflexion théologique et philosophique moderne. Il est plus difficile d’acquérir la paix intérieure que l’extérieure, observait Jean Chrysostome en commentant le psaume 4. Un apophtegme de Séraphin de Sarov, le grand moine russe du XIXe siècle, condense l’enseignement de la tradition ascétique sur ce point : « Acquière la paix, et des milliers de personnes seront sauvées autour de toi. »

Les chrétiens dans le monde sont appelés à une existence de réconciliés, pour traduire la nouveauté de la paix chrétienne dans l’aujourd’hui de l’histoire. Penser la paix reste un défi ouvert pour la théologie contemporaine. La tradition de la sainteté orthodoxe offre une réponse à cette recherche dans la béatitude vécue par d’innombrables témoins de la paix. Saint Antoine le Grand “avait reçu de Dieu le don de réconcilier ceux qui étaient en discorde » ; comme lui, d’autres saints ont montré une voie de réconciliation comme François d’Assise en Occident, et les grandes figures spirituelles de la tradition orthodoxe dans toutes ses expressions, pour arriver aux pionniers du dialogue entre les Églises et les nouveaux martyrs du XXe siècle qui, à l’image de leur Seigneur, ont vécu l’amour jusqu’à l’extrême, jusqu’au pardon de leur persécuteur.

« Qui nous enseigne la beauté de la paix ? », se demandait saint Basile le Grand : « L’artisan même de la paix. Par le sang de la croix, … il a établi la paix entre les choses du ciel et de la terre (Col 1,20). » Devenir artisan de paix signifie s’exercer à voir la beauté de la paix et la vivre, pour en retrouver la force d’attraction et dilater l’espérance de paix dans le monde.